France : Le record mondial de durée de vie pour un éclair est Provençal : 7,74 secondes…
WMO

Membre de ce comité d’experts et co-auteur de la publication, le responsable technique de Météorage, Stéphane Pédeboy, a été particulièrement moteur dans l’analyse détaillée de l’éclair affichant la plus grande durée jamais mesurée aboutissant à la validation de ce record.

HYMEX

Parmi eux, le HyLMA, basé sur une technologie développée par l’Université du New Mexico Tech au Nouveau Mexique (USA) principalement dédié à la recherche.

Ce système utilise une technique de télédétection de l’électricité atmosphérique qui permet de mesurer avec une efficacité et une résolution jamais atteinte les détails de la propagation d’un éclair en 3D.  En effet, il est capable de détecter et localiser très précisément en continu et en temps réel les canaux ionisés (les « leaders ») dans les nuages et l’atmosphère environnante qui rendent l’air conducteur permettant aux différentes charges électriques présentes de circuler pour se neutraliser aboutissant ainsi à la création des décharges électriques qui constituent un éclair. Le HyLMA est constitué d’un réseau de 12 capteurs distants d’une trentaine de kilomètres les uns des autres qui couvre une zone de 250km x 250 km autour d’Alès. Responsable du HyLMA et spécialement installée au centre de coordination de SOP1 à La Grande Motte, c’est l’équipe scientifique « ST Lightning » d’Hymex dont Stéphane Pédeboy fait partie qui a enregistré cet éclair d’une durée exceptionnelle de 7,74 s. (Plus d'informations sur le projet Hymex)

En effet, la durée de la quasi-totalité des éclairs n’excède généralement pas quelques centaines de millisecondes et les conditions extrêmes requises pour qu’un tel phénomène se produise sont malgré tout rares et la surprise vient principalement que l’on ne pensait pas qu’en France de telles conditions se produisent. Seuls les orages qui présentent une région stratiforme, la fameuse enclume que l’on peut observer au sommet du nuage, sont éligibles à de tels éclairs. Cette région qui s’étend sur plusieurs kilomètres à l’avant du cumulonimbus comporte des charges électriques qui permette la création d’éclair avec une composante horizontale très étendue.

record mondial - map

En l’occurrence, l’éclair record enregistré dans la nuit du 30 août 2012 a couvert une région délimitée par un pentagone dont les sommets se trouvent à Mirabel, Uzès, Pourrières, Mézel et Lesches-en-Diois. Il a débuté au-dessus de Valréas à 04 :18 :50 pour venir mourir près de 8 secondes plus tard au-dessus de Brunet après avoir parcouru une distance d’environ 160 km selon un axe Pierrelatte-Brignoles. Si en fin de vie, l’éclair a culminé jusqu'à 12 km d'altitude dans la région de Les Mées, il faut remarquer qu’il ne s’est pas contenté de rester confiné au sein du nuage. En effet, le réseau national de détection de la foudre Météorage, a détecté un total de huit « arcs en retour » tout au long du trajet horizontal de l’éclair, à savoir des décharges verticales entre le nuage et le sol que le HyLMA ne peut pas détecter. La polarité du courant des décharges qui se sont produites au début de l’éclair sont paradoxalement positives alors que les deux dernières décharges en fin de vie de l’éclair sont de polarités négatives.

Cette observation permet de conclure que la structure électrique du nuage au moment où l’éclair s’est produit est pour le moins inhabituelle. En effet, une analyse détaillée des mesures effectuées par le HyLMA montre que le cumulonimbus présentait une structure de type « dipôle inversé ». Traditionnellement, un cumulonimbus présente une distribution de charges électriques ou la majorité des ions positifs se trouve au sommet du nuage (vers 10 km d’altitude) alors que les ions négatifs sont concentrés au niveau de l’isotherme -10°C soit entre 3 et 5 km d’altitude. On parle dans ce cas d’une structure « dipolaire classique » que l’on peut comparer à un générateur ayant son « pôle + » au-dessus de son « pôle - ». Or, dans le cas présent, le dipôle est inversé c’est-à-dire que les charges négatives se retrouvent au-dessus des charges positives ce qui explique que la majorité des décharges au sol soient de polarité positive.

Les processus et mécanismes aboutissant à l’électrification inversée du nuage d’orage ne sont pas encore tous complètement compris, mais on sait qu’il existe une relation entre la polarité des charges électriques portées par les particules de glace, qui se retrouvent au sommet du nuage, et la vitesse à laquelle elles se forment. Par exemple dans des conditions d’un orage classique, l’eau liquide se transforme en glace rapidement ce qui permet aux particules de glace de se charger positivement alors que dans le cas des orages inversés ce processus de gel est plus lent ce qui aboutit à inverser la polarité des charges sur les particules de glace.

L’étude détaillée de cet éclair hors norme révèle donc des surprises intéressantes pour la communauté scientifique mais elle devrait aussi permettre de faire évoluer les définitions et les normes établies par l’OMM

Pour consulter l’article (en anglais), cliquez ici

record mondial - carto 3D

Figure 1- Cartographie en 3D de la densité des sources radioélectriques générées par l'éclair du 30/10/2012.

Sur le panneau supérieur on peut voir l'évolution de l'éclair en fonction du temps (abscisses) et de l'altitude (ordonnées). Les triangles verts sur l'axe des abscisses matérialisent les observations des décharges verticales enregistrées par Météorage. Les zones colorées en bleu matérialisent les poches de charges négatives. On peut clairement voir qu’elles se situent au sommet du nuage ce qui implique une inversion de polarité alors que les charges positives (du vert au rouge) se situent en-dessous vers 4 km d’altitude. En fin d’éclair, la polarité du nuage retrouve une certaine « normalité ». Les trois panneaux inférieurs sont respectivement une vue de côté Nord-Sud de l’éclair (haut), vue Est-Ouest (droite) et vue de dessus (en bas).